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đź’ˇ Autolib’, une histoire de densitĂ© et de dĂ©sir

Par : Lesley Brown 29 octobre 2018 no comments

đź’ˇ Autolib’, une histoire de densitĂ© et de dĂ©sir

Octobre 2018 : post-Autolib’, quelle est la suite pour Paris ? Le service pionnier de covoiturage public a Ă©tĂ© dĂ©branchĂ©. Pourquoi cet Ă©chec et qu’est-ce que le conseil municipal planifie Ă  sa place ? Les confĂ©renciers ont donnĂ© quelques rĂ©ponses lors d’une table ronde pendant le salon Autonomie 2018 …

 

 

A sa disparition au cours de l’Ă©tĂ© 2018, Autolib’ comptait environ 150 000 abonnĂ©s, 4 000 voitures Ă©lectriques alimentĂ©es par batterie et 6 300 points de recharge dans 860 stations. Il Ă©tait Ă©galement dans le rouge, avec une dette de plusieurs centaines de millions d’euros, selon BollorĂ©, qui a emportĂ© le contrat de l’Etat pour la gestion du système – la fourniture des bornes de recharge, des voitures Ă©lectroniques et des logiciels – en 2011.

MalgrĂ© sa popularitĂ©, qui a atteint son apogĂ©e en 2016, pourquoi Autolib’ n’a pas rĂ©ussi Ă  garder le cap ? « C’Ă©tait une grande innovation au dĂ©part, mais elle n’a pas rĂ©ussi Ă  suivre le rythme », a dĂ©clarĂ© Gregory DucongĂ©, PDG de Vulog. « L’offre n’est pas restĂ©e en phase avec l’Ă©volution des attentes, comme l’expĂ©rience utilisateur : il y a eu des problèmes sur l’Ă©tat des voitures, elles n’Ă©taient pas toujours propres ou en bon Ă©tat de fonctionnement, et il n’y avait pas toujours un vĂ©hicule disponible quand on en voulait un. »

 

« …  il y a eu des problèmes sur l’Ă©tat des voitures, elles n’Ă©taient pas toujours propres ou en bon Ă©tat de fonctionnement … »

 

Christophe Najdovski, adjoint au maire de Paris, chargĂ© des transports et de l’espace public, a rappelĂ© comment Autolib’ a vu le jour Ă  une Ă©poque oĂą les plates-formes numĂ©riques de transport ne faisaient que dĂ©coller. « Depuis lors, ces technologies se sont massivement dĂ©veloppĂ©es et nous avons assistĂ© Ă  l’Ă©mergence de services de mobilitĂ© perturbateurs tels que les VTC [voiture de transport avec chauffeur] par exemple, qui sont peut-ĂŞtre devenues plus populaires qu’Autolib’ avec le temps. »

Il a Ă©galement pointĂ© du doigt le syndicat mixte, la joint-venture regroupant 100 municipalitĂ©s qui gĂ©rait le service, suggĂ©rant que son dĂ©sir d’Ă©tendre le service trop tĂ´t pourrait avoir contribuĂ© Ă  l’Ă©chec d’Ă©tablir un business model durable. Compte tenu de la forte densitĂ© de population du Paris intĂ©rieur, avec plus de 20 000 habitants au kilomètre carrĂ©, les voitures Autolib’ Ă©taient gĂ©nĂ©ralement utilisĂ©es plusieurs fois par jour ; le scĂ©nario idĂ©al pour un système d’autopartage rĂ©ussi puisque le parc automobile est en rotation et gĂ©nère ainsi des revenus.

Pourtant, en 2014/2015, le syndicat mixte a Ă©tendu le service aux municipalitĂ©s au-delĂ  du centre-ville. Une dĂ©cision que M. Nadjovski a qualifiĂ©e de « dĂ©sordonnĂ©e » et « une erreur ». « Les quartiers en dehors du centre de Paris sont beaucoup plus rĂ©sidentiels, les vĂ©hicules n’Ă©taient donc utilisĂ©s qu’une seule fois par jour », a-t-il soulignĂ©.

La question se pose donc : si Autolib’ avait limitĂ© ses activitĂ©s au centre-ville, serait-il encore opĂ©rationnel aujourd’hui ? Pourtant, il est logique de vouloir offrir le covoiturage aux gens qui vivent Ă  l’extĂ©rieur de la ville. Compte tenu du bon rĂ©seau de transports publics dans le centre de Paris, Autolib’ n’Ă©tait-il pas plus pertinent pour les quartiers en dehors de la ville oĂą les Ă©carts dans la chaĂ®ne de mobilitĂ© sont plus importants ?

Pour combler une lacune en matière de mobilitĂ©, la ville française de Nice s’est associĂ©e Ă  Uber en juillet 2018 pour lancer un service pilote de nuit de 12 mois. Pour un tarif forfaitaire de six euros par trajet, les titulaires d’un abonnement annuel RĂ©gie Ligne d’Azur (RLA) peuvent prendre un Uber depuis ou vers l’une des six stations dĂ©signĂ©es desservant la ligne 1 du tramway pour effectuer leur trajet. De 20h Ă  2h30, le service est assurĂ© lorsque les bus s’arrĂŞtent aux stations de tramway, Ă  20h, et que le tramway ferme, Ă  2h30 du matin.

 

Pour un opĂ©rateur comme car2go, qui dĂ©ploie un service de covoiturage en libre-service Ă  Paris en janvier 2019, la densitĂ© de population et l’offre de transport public existante sont essentielles – « parce que nous ne sommes qu’un maillon de la chaĂ®ne, offrant une solution parmi d’autres », explique Mathieu Bernasconi, directeur du dĂ©veloppement commercial de la sociĂ©tĂ©.

Lorsqu’il sera pleinement dĂ©ployĂ©, le service Car2go Ă  Paris comprendra une flotte de 400 voitures smart EQ fortwo de Daimler. « L’Ă©cosystème de la mobilitĂ© Ă  Paris est vaste et attractif, c’est un avantage certain pour nous. Nous avons tendance Ă  nous lancer dans des zones denses, puis Ă  nous Ă©tendre au-delĂ  », a-t-il ajoutĂ©. « Comme Ă  Berlin, par exemple, oĂą nos services se sont dĂ©veloppĂ©s Ă  partir du centre-ville. »

PrĂ©sente dans 25 villes du monde entier, l’entreprise allemande est bien placĂ©e pour observer le comportement des consommateurs. « A Madrid, il y a quatre opĂ©rateurs de covoiturage, chacun avec environ 500 vĂ©hicules », a dĂ©clarĂ© M. Bernasconi. « Ce que nous constatons, c’est que plus vous crĂ©ez d’offres, plus la demande augmente. Les jeunes de 20 Ă  30 ans de Madrid n’envisagent pas d’acheter une première voiture Ă  cause de ces services ».

Parmi les autres opĂ©rateurs en compĂ©tition pour l’espace Autolib’, on peut citer Moov’in.Paris, un service en free floating dĂ©veloppĂ© par Renault et ADA, dont le lancement est prĂ©vu fin 2018/2019, et Free2Move, opĂ©rĂ© par Groupe PSA. Tous deux dĂ©marreront avec des flottes d’environ 500 voitures Ă©lectriques.

 

 

Les modèles de services d’autopartage qui seront proposĂ©s Ă  Paris font Ă©galement l’objet d’un dĂ©bat. Libre circulation Ă  l’intĂ©rieur d’une zone d’habitation dĂ©finie, basĂ©e sur une station A-B ou sur une station aller-retour ? Pour fonctionner efficacement et assurer une rĂ©partition uniforme de la flotte, le modèle en free-floating a besoin d’espaces de stationnement dĂ©diĂ©s. « Compte tenu de ce besoin, « nous mettons Ă  disposition 1 000 places Ă  cet effet », a dĂ©clarĂ© M. Najdvoski.

Les coĂ»ts d’abonnement sont Ă©galement prĂ©occupants. Contrairement Ă  Autolib’, qui a Ă©tĂ© subventionnĂ© par la Mairie de Paris, ses successeurs privĂ©s ne recevront aucun soutien financier. Par consĂ©quent, ils se concentreront naturellement davantage sur la mise en place d’une filière commerciale rentable que sur l’offre d’un service public. Un comportement que M. Najdvoski reconnait : « Oui, effectivement ceci soulève la question de savoir combien les clients vont payer. Il y aura inĂ©vitablement un impact ».

Pour l’avenir, il estime que le rĂ´le de la Ville de Paris est de soutenir le covoiturage en rĂ©glementant les nouveaux prestataires de services.

 

Autopartage – leçons tirĂ©es d’Autolib’ par les intervenants de la table ronde :

  • Une forte densitĂ© de population est vitale
  • Éviter de passer Ă  une plus grande Ă©chelle trop tĂ´t
  • Se tenir au courant de l’Ă©volution des technologies et des attentes des clients
  • Un bon service a besoin de beaucoup de vĂ©hicules, ce qui dĂ©pend de l’espace de stationnement disponible
  • De bons services de transport public existants sont un plus

Frost & Sullivan s’attend Ă  ce que le marchĂ© mondial de l’autopartage passe de plus de sept millions de membres et environ 112 000 vĂ©hicules en 2015 Ă  36 millions de membres et quelque 427 000 vĂ©hicules en 2025.