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JEDI – Joint European Disruptive Initiative – la DARPA Européenne

Par : Lesley Brown 3 janvier 2019 no comments

JEDI – Joint European Disruptive Initiative – la DARPA Européenne

Le 18/01/19, par Charlotte Marrécau

Le 14 décembre dernier, Futura-Mobility a reçu André Loesekrug-Pietri, ancien conseiller spécial de la ministre des Armées, fondateur de A.CAPITAL et porte-parole de JEDI, la « Joint European Disruptive Initiative ».

« L’Europe est en train de perdre la bataille technologique. Ses valeurs, et même la démocratie, sont en danger », d’après André Loesekrug-Pietri.

L’Europe doit trouver sa place dans la bataille technologique

André Loesekrug-Pietri décrit la position, plus qu’alarmante, de l’Europe face à une accélération technologique  sans précédent. Des technologies comme l’intelligence artificielle (IA) et la blockchain, qui sont aujourd’hui bien réelles, touchent tous les secteurs et se développent à grande vitesse. Mais dans de nombreux domaines, « l’Europe reste une colonie numérique des puissances américaines et chinoises », explique André Loesekrug-Pietri dans son article : « Zuck, Europe et Viva-Tech – le syndrome de Stockholm ? ». Il est convaincu que si l’Europe ne se mobilise pas pour devenir un leader dans les  technologies, elles  lui seront alors imposées par les GAFAM* ou les BATX**.

Les chiffres prouvent en effet que, dans cette bataille, l’Europe n’a pas encore pris sa place :

  • Dans le top 10 des plus grands groupes du monde par capitalisation boursière, pas un seul n’est français ni européen. Sept de ces dix groupes sont dans la technologie, et tous sont récents. On y trouve les géants américains des GAFAM ainsi que les chinois Alibaba.com et Tencent (créateur de WeChat).
  • Sur la totalité des investissements mondiaux dans l’IA, 48 % sont engagés par la Chine, 38 % par les Etats-Unis et seulement 14 % par le reste du monde.

Les grosses entreprises privées comme les GAFAM n’ont pas peur d’investir de l’argent et du temps dans des projets qui ne connaîtront peut-être pas le succès. « Ils grillent de l’argent pour essayer », souligne André Loesekrug-Pietri. C’est la raison pour laquelle, d’après lui, il est fondamental de dé-risquer les projets – pour pouvoir développer des prototypes, les tester et vérifier leur intérêt avant leur prise en charge par des entreprises ou des fonds d’investissement.

Mais le problème n’est pas seulement financier. « Il faut également arrêter de faire de l’innovation incrémentale et mettre l’effort sur l’innovation de rupture », affirme André Loesekrug-Pietri. La DARPA a seulement investi 60 milliards de dollars en 60 ans contre 85 milliards par l’Europe sur 6 ans… et a donné naissance à Internet, au système de GPS, aux drones et à SIRI.

Dans ce monde de la technologie, une fois qu’un leader est établi, il occupe tout le marché. « The winner takes it all », souligne André Loesekrug-Pietri. L’enjeu pour survivre dans cette bataille est donc d’être très rapide et disruptif.

La DARPA américaine, un exemple à suivre ?

Pour répondre à cet enjeu fondamental, André Loesekrug-Pietri s’est inspiré de la DARPA pour comprendre ses facteurs de réussite. La DARPA finance des grands challenges qui, avec une méthodologie particulière, mettent sur pied d’égalité les grosses entreprises, les start-up et les centres de recherches. Elle évalue les projets, nés de ces challenges, sur des critères comme la rapidité de mise en place du projet, la possibilité d’échouer rapidement et l’opportunité de traverser les frontières.

Ainsi, André Loesekrug-Pietri a lancé, avec d’autres grands noms, l’association « Joint European Disruptive Initiative », appelée JEDI. Il définit JEDI comme un « outil européen agile destiné à financer et accompagner l’innovation, afin d’obtenir des innovations de rupture aboutissant à des changements de business-models ».

Formée de 150 personnes, majoritairement des directeurs de sociétés technologiques (les start-up et grands groupes) ainsi que des chercheurs, JEDI met en lien les acteurs publics et privés de l’innovation. Les grands groupes, les start-up, les PME et les centres de recherches travaillent ensemble sur des briques technologiques.

Le maître-mot de cette initiative est la rapidité, pour prouver l’efficacité du dispositif et convaincre les parties prenantes. Dans cette optique, il n’est pas question d’attendre que les 26 pays de l’UE s’engagent. « Le club est ouvert à tous les européens mais on commence avec ceux qui sont là »,  explique André Loesekrug-Pietri. L’initiative commence donc avec la France et l’Allemagne. Les pays de l’Est de l’Europe sont également très intéressés par cette dynamique.

La méthodologie JEDI

A l’image de la DARPA, JEDI a créé sa propre méthodologie, adaptée à l’Europe, avec :

  • Des objectifs qui répondent aux grands enjeux de la société.
  • Du sens pour embarquer les citoyens.
  • Un écosystème de l’innovation rassemblé pour identifier les points de blocage et unir forces et investissements pour les résoudre.
  • Un mode rapide et agile pour réussir.

Quatre grandes missions sont définies par JEDI : le changement climatique, la santé, la transition digitale centrée sur l’humain et les nouvelles frontières. Pour chacune de ces missions, l’objectif est de lancer un challenge et de sélectionner un nombre limité de projets rapides et disruptifs que JEDI subventionnera (entre 15 et 20 millions d’euros.) En plus de cette aide financière, chaque projet sera accompagné de coachs. Ces coachs sont appelés les « Programme Managers » : 15 experts charismatiques, détachés de leurs entreprises pour 4 ans, ayant le recul nécessaire pour ne pas s’initier opérationnellement dans les projets et rester neutres.  L’unique obsession de la démarche est d’arriver rapidement à un prototype et de pouvoir le tester, mais surtout d’être les premiers sur le marché.

Pour compléter ces challenges, JEDI organise des « MoonShot Days » ou usines à idées. Une fois par mois, un des membres de l’association, expert en technologie ou doté d’autre compétences interdisciplinaires (comme par exemple la science fiction), fait une présentation de trois quart d’heure sur une problématique majeure en lien avec son expertise. Ces présentations sont l’occasion de générer de nouvelles idées et d’identifier de nouveaux challenges.

En mars, un de ces rendez-vous est co-organisé avec Futura-Mobility sur le thème de la mobilité du futur.

*GAFAM : Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft

**BATX : Baidu, Alibaba, Tencent et Xiaomi