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💡 Transformation des business models – partie 1

Par : Lesley Brown 7 mai 2018 no comments

💡 Transformation des business models – partie 1

Le 20 avril, 2018 : le thème de cette sĂ©ance de Futura-Mobility Ă©tait « la transformation des business models des industriels de la mobilitĂ© ».

Ont participĂ© : SNCF RĂ©seau, Safran, Airbus, Keolis, Bouygues, Alstom, Car Studio, Groupe Mobivia, NAWA Technologies et ALD Automotive.

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Pierre-Etienne Franc, vice-prĂ©sident, Hydrogen Energy World business unit, chez Air Liquide, a ouvert les dĂ©bats Ă  propos de son dernier ouvrage « Entreprise & bien commun Â», paru aux Ă©ditions du Palio.

 

« L’entreprise ne peut limiter son ambition Ă  sa performance, mais doit s’emparer de la question du bien commun Â» – Pierre-Etienne Franc
Le monde change…

D’après Pierre-Etienne Franc, « la finitude des ressources est telle que si on continue sur le modèle productif actuel, on va dans le mur. Ce premier Ă©lĂ©ment fait que les entreprises vont ĂŞtre confrontĂ©es Ă  des changements de paradigmes complets Â».

Le deuxième Ă©lĂ©ment, « c’est l’impuissance très forte des États Ă  diriger et Ă  encadrer l’économie (…) il n’y a plus de certitude dans les règlementations qui sont imposĂ©es Ă  l’entreprise Â».

Et, troisième Ă©lĂ©ment, « la puissance de la rĂ©volution digitale (…) fait qu’aujourd’hui nous sommes dans un monde qui n’est pas transparent mais qui tend Ă  l’être Â».

Il ajoute : « l’entreprise ne peut plus se contenter de pousser une solution technique sans avoir une claire conscience de ses consĂ©quences sur l’environnement et le bien commun Â». Sinon, gare Ă  la pluie de critiques sur les rĂ©seaux sociaux par les consommateurs, les autoritĂ©s ou la concurrence.

… changeons de posture

Pour les sociĂ©tĂ©s comme Air Liquide, auparavant dans des relations plus confidentielles d’industriel Ă  industriel, « c’est un vrai renversement d’approche de notre prĂ©sence au monde et Ă  la sociĂ©tĂ© ».

Sur des sujets comme la transition Ă©nergĂ©tique, « il faut accepter d’entrer dans le jeu d’un dĂ©bat politique et technique pour faire avancer les solutions. » Pour l’hydrogène par exemple, les sujets que sont la sĂ©curitĂ©, la production d’hydrogène dĂ©carbonĂ©, la compĂ©titivitĂ©, et la performance relative Ă  la batterie sont, pour Air Liquide,  des thèmes sur lesquels il est indispensable d’avoir une position « claire, transparente et juste, c’est-Ă -dire dĂ©fendable Â», pour asseoir sa crĂ©dibilitĂ©.

Le discours doit s’accompagner d’engagements forts, par exemple, Air Liquide vise pour demain 50% d’un hydrogène totalement décarboné pour les applications la mobilité.

Un changement de leadership est aussi nĂ©cessaire : l’entreprise doit aller vers le leadership ouvert et « interagir en permanence avec d’autres acteurs autour d’elle Â», et pas seulement ĂŞtre centrĂ©e sur sa propre performance opĂ©rationnelle.

Un combat politique

Puisqu’il y a de l’incertitude sur toutes ces technologies, c’est un combat politique !

« Ma conviction, c’est que dans ce monde d’incertitude, seules les entreprises qui ont des convictions et qui de fait, affichent une force d’âme et une stratĂ©gie qui n’est pas que financière, seules ces entreprises vont, demain, survivre et dĂ©passer les autres. Parce qu’elles sont animĂ©es d’une forte qui est plus puissante que la simple performance financière ».

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Yann Marteil, directeur gĂ©nĂ©ral dĂ©lĂ©guĂ© de Mobivia, poursuit les dĂ©bats, avec Florence Sanson, directrice gĂ©nĂ©rale de Car Studio, en exposant les ruptures en cours et Ă  venir  dans le Groupe Mobivia.

 

« On a dĂ©cidĂ© de devenir un groupe de mobilitĂ© en 2009/2010. Ce qui implique une transformation radicale de l’organisation et de la culture Â» – Yann Marteil

 

Les grands changements en cours sont connus : la voiture Ă©lectrique requiert en effet « 50% de moins d’entretien qu’une voiture thermique Â» ; la mobilitĂ© partagĂ©e change le profil de la clientèle du groupe « nos clients sont de plus en plus des flottes de vĂ©hicules Â», note Yann Marteil ; et dernier Ă©lĂ©ment, depuis 10 ans, la part de jeunes passant le permis de conduire diminue très fortement, « surtout en ville Â».

Ainsi, le contexte d’intervention du groupe français, spécialisé dans l’entretien et l’équipement de véhicules multi-marques, change et fait évoluer ses métiers.

« Le patron de Ford dit : je ne suis plus un fabricant de voitures, je suis un opĂ©rateur de mobilitĂ©. Et Ford rachetĂ© Chariot qui fait des navettes, des bus urbains, du vĂ©lo Â», remarque M. Marteil. Face Ă  ces constats, Mobivia se transforme.

 

Source: UC Berkeley, April 2018

 

Via ID  fait partie de cette transformation. Créé en 2009, cet accĂ©lĂ©rateur de starts-ups intervient sur le seul sujet des nouvelles mobilitĂ©s – « car finalement les clients viennent chez nous parce qu’ils ont besoin de se dĂ©placer –  donc on va s’adresser Ă  eux avec un autre regard et essayer de crĂ©er de nouveaux actifs dans les nouvelles mobilitĂ©s Â», explique M. Marteil.

« On s’intĂ©resse uniquement Ă  des sociĂ©tĂ©s qui font les mobilitĂ©s du quotidien, innovantes et durables, et les trois Ă  la fois. On crĂ©e des sociĂ©tĂ©s et on investit dans des starts-ups dans le covoiturage, l’autopartage, les vĂ©los en libre service, la voiture connectĂ©e, etc. Â».

Aujourd’hui, Via ID a 20 startups sous son aile, comme par exemple Swiftly, Heetch, Drivy ou Go-jek.  « On les aide Ă  scaler : Ă  grandir très vite ». Via ID, en tant qu’actionnaire apporte de l’expertise (juridique, financier, RH…) mais convainc aussi d’autres investisseurs : « car chez Mobivia on pense qu’on est trop petit pour faire tout seul Â», prĂ©cise M. Marteil. C’est une vĂ©ritable rĂ©volution chez Mobivia, un groupe familial qui s’était jusqu’ici construit tout seul !

Mobivia est prĂ©sent ainsi Ă  Paris, San Francisco, Berlin, Singapour et apporte ainsi aux start-ups une vision mondiale, « ce sont les villes les plus avancĂ©es et pionnières sur les sujets de mobilitĂ©. On y fait aussi de la veille et de l’investissement Â», ajoute M. Marteil.

Il constate, en France, une prise de conscience des pouvoirs publics que les changements dans le monde de la mobilitĂ© doivent ĂŞtre accompagnĂ©s sur le plan lĂ©gislatif. Mais, «  il faut penser europĂ©en, sinon on va ĂŞtre Ă©crabouillĂ© parce qu’on n’a pas l’échelle Â». Son travail est justement de faire passer les starts-ups Ă  l’échelle dans une compĂ©tition mondiale avec de grands moyens financiers.

Transformation en interne par Car Studio

En tant que lab interne du groupe Mobivia, Car Studio est une structure d’open innovation qui cherche à accélérer les solutions innovantes pour Norauto, Midas et Carter-Cash. Centrée sur l’entretien automobile, en pleine évolution aujourd’hui, ces marques sont le cœur du métier du groupe.

 

« La culture de l’entreprise, historiquement très discrète, se tourne aujourd’hui vers une posture plus ouverte. Notre problĂ©matique est de passer d’une culture de distributeur Ă  une culture orientĂ©e clients ; pas seulement pour l’entretien auto mais aussi pour la mobilitĂ© en gĂ©nĂ©ral Â» – Florence Sanson

 

En plus de Via ID, Car Studio contribue Ă  ce changement profond de culture chez Mobivia, Ă  travers quatre pĂ´les :

– l’investissement dans des starts-ups aussi. « La valorisation d’une start-up n’est absolument pas en lien avec les lignes de cash qu’elle arrive Ă  produire. C’est une dĂ©marche très nouvelle pour Mobivia et c’est un changement de culture très important Â», affirme Mme Sanson ;

– l’incubation des projets internes et externes mĂ©langĂ©s. Par exemple, un des projets d’entreprenariat est dans la mobilitĂ© inclusive : « comment rendre accessible la prestation d’entretien aux populations les plus fragiles ? Â» ;

– la R&D pour faire évoluer le business model et l’outil industriel qu’est le garage ;

– les partenariats business : construction de nouveaux services innovants avec des starts-ups, par exemple avec WeProove, un diagnostic auto certifiĂ© et gĂ©olocalisĂ© pour assurer la transparence du service aux clients ou Allo Joe pour appeler un mĂ©canicien Ă  domicile.

« Aussi, toutes nos vĂ©hicules de courtoisie qu’on prĂŞte Ă  nos clients le temps d’une intervention sont Ă©lectriques ; ce qui contribue Ă  la vulgarisation de ce mode de transport. Et pour la sĂ©curitĂ© routière, on a investi dans Cosmo Connected, un phare dans les casques moto et vĂ©lo Â», illustre Mme Sanson.

« La question n’est pas de savoir quand le changement va arriver, mais la question c’est de pouvoir comment ĂŞtre ne serait-ce qu’un quart d’heure en avance pour pouvoir effectivement transformer notre cĹ“ur de mĂ©tier Â», conclut Florence Sanson.

 

L’évolution des business models

Eric Sadin, philosophe, et Ă©crivain, auteur notamment de La silicolonisation du monde : L’irrĂ©sistible expansion du libĂ©ralisme numĂ©rique, aux Ă©ditions L’échappĂ©e a partagĂ© avec les membres de Futura-Mobility sa vision de l’évolution des business models (compte-rendu complet dans l’espace membres).

 

« Peut-ĂŞtre qu’avec la blockchain, devient possible le rĂŞve libertin et libertarien d’agir sur le web de façon sĂ©curisĂ© et sans intermĂ©diaire (de pair Ă  pair / peer-to-peer) Â» – Eric Sadin

 

Après un retour sur les modèles de la « net-economy Â» des annĂ©es 2000 et le modèle actuel, dominĂ© par la puissance des plateformes, M. Sadin Ă©voque la blockchain comme le prochain bouleversement majeur. « Peut-ĂŞtre qu’avec la blockchain, devient possible le rĂŞve libertin et libertarien d’agir sur le web de façon sĂ©curisĂ© et sans intermĂ©diaire (de pair Ă  pair / peer-to-peer) Â». affime-t-il.

Avec la blockchain, chacun pourra en effet proposer ses services (location de sa voiture par exemple) sur un protocole de blockchain, sans aucun intermĂ©diaire et de façon sĂ©curisĂ©e. « Ce sera l’avènement du règne du comparatif de tout avec tout : chaque service, chaque Ă©lĂ©ment de chaque personne, chaque instant Â», pour permettre la confiance.

Pour M. Sadin, le nerf de la guerre industrielle du futur, dans la mobilitĂ© notamment, est la connaissance très fine des comportements des individus pour pouvoir « formuler la bonne parole au bon endroit Ă  la bonne personne, Ă  chaque instant, Ă  chaque Ă©chelle de la planète Â». Dans ce contexte, la voiture autonome est un outil de collecte de donnĂ©es, et « il est intĂ©ressant de relever que c’est Google qui a donnĂ© le ton Â», remarque M. Sadin.

Pour les entreprises, plutĂ´t que de cĂ©der au « groupisme Â» ambiant, « l’idĂ©e est ĂŞtre Ă  la plus grande l’écoute (l’ouverture) des sociĂ©tĂ©s en gĂ©nĂ©ral de tous types de besoins et d’exigences. Et Ă  la fois ĂŞtre dans la singularitĂ© qui donne d’autres pistes Â», conclut-il.

 

Cliquez ici pour l’intervention de Jean-Pierre Farandou, président, Keolis

 

Cliquez ici pour l’intervention de Pascal Boulanger, président-fondateur de NAWA Technologies