.. Chargement en cours ..

Exploration de Futura-Mobility en Suisse, le pays le plus innovant au monde

Par : Lesley Brown 1 février 2024 no comments

Exploration de Futura-Mobility en Suisse, le pays le plus innovant au monde

Grace à des facteurs à la fois sociétaux, politiques et géographiques, la Suisse s’est forgée une identité de véritable terrain d’innovation dans tous les domaines d’activité, y compris les transports. Ce n’est pas récent ! En effet, selon l’indice mondial de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI), en 2023 la Suisse est toujours le pays le plus innovant du monde pour la douzième année consécutive.

« Le rêve suisse » 

Un subtil mélange de confiance, de modestie et de compromis

Fin octobre 2023, une délégation de Futura-Mobility, le think-tank de prospective et d’innovation des acteurs des mobilités, s’est rendue en Suisse pour explorer cet écosystème d’innovation à travers des visites aux laboratoires de R&D, des instituts et des rencontres de jeunes pousses. Parmi les participants figuraient des représentants de la SNCF, Keolis, Valeo, Plastic Omnium, Stations-e, Paragon Mobility, ESTACA et Bouygues. Les principaux domaines explorés étaient l’énergie, et, plus largement, la mobilité et l’innovation.

Parmi les participants au voyage exploratoire de Futura-Mobility figuraient des représentants de la SNCF, Keolis, Valeo, Plastic Omnium, Stations-e, Paragon Mobility, ESTACA et Bouygues

La visite de Futura-Mobility a été grandement facilitée par le soutien du Greater Geneva Bern area (GGBa), l’agence de promotion économique de Suisse occidentale qui représente six cantons francophones ou bilingues :  Berne, Fribourg, Vaud, Neuchâtel, Genève et Valais.

Sa mission consiste à soutenir les entreprises étrangères (démarches administratives, conseils au niveau de la fiscalité, relations avec l’UE, etc.) afin qu’elles puissent s’établir rapidement et développer leurs activités dans la région.

Les entreprises françaises et internationales établies dans les six cantons sous la houlette de l'agence GGBa (source : GGBa)

La Suisse a compris que pour développer l’innovation, une législation favorable et la rencontre entre les sphères académique et industrielle sont indispensables.  Au niveau législatif, tout est pensé, planifié et les dépenses sont programmées et sécurisées à moyen-long terme. Le cadre législatif est  ainsi stable et permet l’investissement. Sara El Kabiri, experte mobilité du futur au sein de l’Office fédéral du développement territorial ARE, rencontrée pendant le voyage, a bien illustré cette approche. Elle a présenté un panorama de la politique des transports en Suisse, depuis le 19e siècle jusqu’aux études prospectives actuelles et les plans de développement des transports associés.

Sara El Kabiri, experte mobilité du futur au sein de l’Office fédéral du développement territorial ARE, présente les politiques publiques de mobilité en Suisse à Futura-Mobility

La Suisse en quelques chiffres-clés

(source : site de la Confédération suisse – 2021)

On remarquera l’importance du secteur secondaire générant 25 % du PIB en Suisse en 2021 (contre 17 % en France et 23 % en Allemagne).

  • ⁠ ⁠Le produit intérieur brut (PIB) par habitant de la Suisse est le deuxième plus élevé au monde (en 2020, il atteignait 86’850 USD selon les statistiques du FMI).
  • ⁠ ⁠En comparaison internationale, le niveau de la dette publique en Suisse reste relativement bas (et ce même après la crise liée à la pandémie de COVID-19). Début 2021, la dette publique brute (avant déduction du patrimoine financier) s’élevait à près de 15 % du PIB (soit environ 100 milliards de francs).
  • ⁠ La TVA suisse est la plus basse d’Europe. Son taux est fixé à 8 % pour la majorité des biens et services, 3,7 % pour les prestations d’hébergement et 2,5 % pour les biens de première nécessité.
  • ⁠ ⁠La Suisse consacre chaque année plus de 22,5 milliards de francs à la recherche et au développement (R&D), soit environ 3 % de son PIB. Plus des deux tiers de cette somme sont investis par des entreprises privées.
  • ⁠ ⁠La Balance commerciale suisse excédentaire de + 43 Mds de CHF en 2022 (-164 Mds € France ; +82 Mds € Allemagne) – source Eurostat.

L’EPFL, un creuset d’innovation en lien avec les entreprises

Avec ses 360 laboratoires, 2 500 PHD, plus de 12 000 étudiants de 130 nationalités et plus de 500 startups depuis sa création, l’EPFL à Lausanne est un lieu unique, où éducation, recherche et innovation se mêlent avec le tissu économique local, et international. En son sein, Antoine JourdanDirecteur de Switzerland Innovation Park West EPFL  est chargé de faire le lien entre les besoins des entreprises et les axes de recherche de l’EPFL et des autres réalités académiques suisses. Il travaille avec les entreprises dès l’étape de l’inspiration, puis au travers de collaborations scientifiques, jusqu’à un accompagnement très concret de projets. Il facilite également l’accès aux talents pour les entreprises, et les aide à avoir une vision longue terme par rapport à leur présence dans le pays, spécifiquement dans les parcs d’innovation, comme l’EPFL Innovation Park.

Parmi les projets menés par les laboratoires axés sur la mobilité, celui des trains équipés de caméras pour analyser les déformations des rails en temps réel illustrent parfaitement cette synergie entre la théorie et la pratique. Autre sujet, l’étude sur le lancer d’avions en papier pourrait, au-delà du simple amusement, avoir des implications importantes dans l’aérospatiale ou la conception de véhicules.

Pour aider les entreprises à mieux comprendre l’écosystème d’innovation suisse et les accompagner, lEPFL a développé la plateforme KNOVAElle facilite la compréhension des besoins spécifiques des entreprises et identifie les opportunités d’innovation au sein de l’écosystème. Des sessions de ‘sprint’ mensuelles et des périodes d’immersion de plusieurs mois permettent aux entreprises de collaborer étroitement avec des experts et des chercheurs, favorisant ainsi le développement de solutions innovantes.

Autre outil de collaboration, le parc de co-création Ecotope cherche à décloisonner encore davantage les frontières entre les entreprises, les laboratoires de recherche et les startups, en favorisant la co-création entre « les décideurs politiques, les chercheurs, les investisseurs, les cadres, les entrepreneurs, les étudiants et les citoyens ».

VITA, pour une IA « socialement consciente »  

Les recherches du laboratoire Visual Intelligence for Transportation (VITA) à l’EPFL Lausanne ouvrent la voie à un avenir où les véhicules autopilotés ou bien les robots de livraison feront partie de la vie quotidienne. Les espaces de vie des maisons, terminaux et villes pourraient également être équipés d’une « intelligence ambiante » (les technologies du quotidien fonctionnent ensemble de manière transparente) capable de percevoir le comportement humain et d’adapter les réponses à y apporter.

VITA a développé le concept de « l’intelligence artificielle (IA) socialement consciente », capable de percevoir, naviguer et négocier au sein d’environnements et d’interactions socialement complexes. Utilisant notamment de l’analyse d’image par l’IA, le laboratoire s’attache à la meilleure connaissance des flux de personnes sur des parcours, sur la prédictivité des comportements humains, ainsi que sur les jumeaux numériques des villes.

Expert en éthique de l’IA au sein du VITA, le professeur assistant Alexandre Alahi  questionne notamment les choix éthiques liés à l’autonomie dans la mobilité. Il souligne l’importance d’aborder des questions cruciales telles que la responsabilité en cas d’accident, les décisions morales prises par les systèmes autonomes et l’impact social de la mobilité autonome. En particulier, l’éthique liée à la sécurité routière est au cœur de ses préoccupations.

La présentation du professeur assistant Alexandre Alahi, expert en éthique de l’IA au sein du VITA

Les experts du secteur automobile estiment souvent que le principal obstacle au déploiement généralisé des voitures autonomes (VA) réside dans la complexité technologique et les défis liés à la prédiction des comportements humains. Les systèmes autonomes doivent non seulement percevoir leur environnement, mais aussi anticiper les actions des piétons et autres véhicules, ce qui nécessite des avancées significatives en matière de détection et d’analyse des signaux sociaux.

Pour répondre à ces défis, les chercheurs au laboratoire VITA explorent des méthodes pour enseigner aux IA les normes éthiques et sociales, tout en permettant une adaptation contextuelle. Des solutions telles que la reproduction de l’éthique individuelle ou collective dans les IA sont envisagées, avec des mécanismes permettant aux utilisateurs de partager leurs valeurs éthiques avec les systèmes autonomes.

LASUR, regarder à la loupe l’expérience de mobilité 

Également au sein de l’EPFL à Lausanne, le laboratoire de sociologie urbaine (LASUR), est composé d’une vingtaine de chercheurs et de doctorants unis pour la compréhension des expériences urbaines dans une perspective de sciences sociales. Sous la direction du professeur Vincent Kaufmann, travaille notamment sur toutes les formes de mobilités, des personnes comme des marchandises, en zone urbaine.

Seul laboratoire de sociologie au sein de l’EPFL, le LASUR est indispensable pour comprendre l’acceptabilité et l’adoption par la population des technologies développées par les ingénieurs, et pour anticiper ou observer les usages.

Lors de la visite de Futura-Mobility, le rapport à la vitesse et les questions posées par la dé-mobilité ont été deux des sujets approfondis par le professeur Kaufmann.

At LASUR, Vincent Kaufmann's team works on every kind of mobility, for people and goods, in urban areas

Dans notre société contemporaine, la vitesse est souvent synonyme de progrès et de réussite. Se déplacer rapidement sur de longues distances, fréquemment, est souvent valorisé, perçu comme un signe de dynamisme et de succès. Même dans les laboratoires de recherche, les meilleurs sont envoyés dans des colloques lointains pour présenter leurs recherches.

Cette norme sociale de la vitesse soulève des questions importantes, notamment en ce qui concerne son impact sur l’environnement et sur la qualité de vie des individus.

En Suisse par exemple, le mode de vie de beaucoup de gens est basé sur la mobilité pendulaire : les individus trouvent du travail dans des villes éloignées mais choisissent de ne pas déménager, comptant plutôt sur les réseaux de transport pour leurs déplacements quotidiens. Cette pratique repose sur le principe de réversibilité, c’est-à-dire que les individus utilisent les potentiels de vitesse procurés par les infrastructures existantes pour éviter de faire des choix irréversibles tels que le déménagement, qui entraîneraient des changements significatifs dans leur vie quotidienne, voire la migration inter-régionale, qui entraîneraient des changements significatifs dans leur vie quotidienne, notamment sur le plan scolaire, linguistique et culturel.

Une recherche intitulée « Job Mobilities and Family Lives in Europe » (2016) a révélé que près d’une personne sur deux dans plusieurs pays européens avait été confrontée à des déplacements à longue distance intensifs et réguliers (tous les jours ou toutes les semaines, ou avec fréquemment une nuit sur place) pour mener sa vie professionnelle. Les individus vivant cette réalité sont généralement moins heureux que les autres et connaissent un taux de divorce plus élevé. Les chercheurs s’accordent à dire que la mobilité excessive constitue l’un des principaux obstacles à la décarbonation des déplacements.

Face à ces défis, des initiatives commencent à émerger. Par exemple, certains instituts de recherche envisagent de mettre en place des quotas de carbone par laboratoire, incitant ainsi les chercheurs à réduire leurs déplacements et à adopter des pratiques plus durables.

L’énergie était le thème principal du voyage exploratoire de Futura-Mobility en Suisse. Notre article dédié – La Suisse, territoire d’innovation pour des systèmes énergétiques plus performants  – détaille les découvertes et les rencontres autour de ce vaste sujet, notamment auprès :

–   de l’EPFL Valais, dans le canton de Sion, et plus spécifiquement le campus Energypolis

– du laboratoire Industrial Process and Energy Systems Engineering (IPESE), au sein d’Energypolis

– du Swiss Battery Technology Centre (SBTC) au Switzerland Innovation Park Biel/Bienne

– de l’iBAT, un réseau universitaire de recherche, d’industrie et de gouvernement, et de CircuBAT (Circular Economy Lithium-Ion Batteries), qui visé à « améliorer les batteries dès la conception pour permettre un recyclage plus efficace et prolonger leur durée de vie ». Deux projets phares du SBTC

– du Centre de recherche sur le stockage de l’énergie de la Haute école spécialisée bernoise

– de WattAnyWhere, une jeune pousse franco-suisse qui propose une solution d’approvisionnement énergétique supplémentaire par production d’électricité à partir de biomasse, indépendamment du réseau électrique.

En plus de s’intéresser à la question énergétique, Futura-Mobility a également profité de ce voyage en Suisse pour rencontrer des startups dans des phases différentes de développement, ainsi que des personnes et des communautés  inspirantes dans le domaine des mobilités.

Swisspod, le projet hyperloop « made in Switzerland »

En 2018 et 2019, l’équipe EPFLoop arrive 3ème sur 1 000 équipes dans le concours hyperloop d’Elon Musk. Par la suite, elle s’est associée avec l’EPFL-DESL pour la recherche et le développement d’un hyperloop “designed in Switzerland” et c’est ainsi qu’est née Swisspod.

« Un système hyperloop est une série de capsules à haute vitesse et à faible consommation d’énergie dans un environnement à très basse pression », résume Mario Paolone. « « Étant donné le temps nécessaire pour arriver à la vitesse de croisière de 600 ou 700 km/h, ce n’est pas faisable d’arrêter tous les 100 km donc ce mode de transport n’est pas en concurrence avec le train mais plutôt avec les vols intracontinentaux et pourrait donc bouleverser notre façon de voyager. »

La particularité du projet Swisspod réside dans son système de propulsion qui ne nécessite pas de rail actif (comme dans le train à haute vitesse Maglev) et du système de lévitation de la capsule intégré à la propulsion. Côté vitesse, l’optimum envisagé par l’équipe est de 610 km/h, car selon les calculs issus de la thèse de doctorat de Denis Tudor, aller encore plus vite nécessiterait trop d’énergie dépensée pour chaque km parcouru. On est clairement sur une démarche éloignée de la promesse de M. Musk (en 2013) à 1 200 km/h !

En mettant l’accent sur l’efficacité énergétique, la durabilité et la réduction des coûts de l’infrastructure, la technologie de transmission de SwissPod est conçue de manière modulaire, ce qui permet différentes configurations de systèmes. Cette approche ouvre un horizon de possibilités pour différents types d’applications telles que le transport de marchandises ou de passagers.

L’objectif est de cibler d’abord le fret (0,5% du marché suisse est ciblé) avant de s’intéresser au transport des passagers, « parce qu’il servira de tremplin pour évaluer la sécurité et collecter des données », détaille M. Paolone. Une application potentielle pour transporter les marchandises serait un tube reliant les centres de tri situés à l’extérieur des centres-villes aux centres de distribution situés à l’intérieur.

A Lausanne en 2021, Swisspod a mis en place la première installation d’essai hyperloop à trajectoire infinie, puisque circulaire, au monde.  « Cette piste d’essai hyperloop à échelle réduite (1/12) est conçue pour minimiser la consommation d’énergie et le coût de l’infrastructure, tout en imitant le plus possible la vitesse et les caractéristiques physiques de son modèle correspondant à l’échelle réelle », explique Denis Tudor. Pourquoi circulaire ? « Car pour tester réellement le système de propulsion et le système de pilotage automatique, il faut une trajectoire d’environ 100 km, ce que permet la piste circulaire ».

Une fois le prototype de la capsule prêt en juillet 2023, les premiers essais sur cette piste ont débuté en octobre 2023.

Cargo Sous Terrain, le transport de marchandises sans nuisance

Peut-être à l’aube d’une prochaine révolution du transport de marchandises, Cargo Sous Terrain, une entreprise créée en 2017 à Bâle, développe une solution innovante : un système de transport de marchandises sur une distance de 500 kilomètres à travers des tubes installés à 20 à 60 mètres sous terre.

Comment fluidifier le transport des marchandises (source : Gabriele Guidicelli, directeur technique & énergie, Cargo Sous Terrain)

Cette infrastructure de tubes à trois voies (deux pour le transport et une au milieu pour la maintenance), vise à répondre à une demande croissante de transport tout en évitant d’engorger les infrastructures existantes telles que les voies ferrées et les routes. En éliminant les émissions et le bruit associés au transport de marchandises, le projet vise à améliorer la qualité de vie des habitants tout en préservant l’esthétique des paysages suisses. L’objectif est également de réduire le trafic de marchandises dans les zones urbaines, contribuant ainsi à désengorger les centres-villes et à améliorer la circulation.

Le système reposera sur 12 centres logistiques stratégiquement situés pour faciliter l’entrée et la sortie des marchandises. Une des caractéristiques uniques du projet est l’utilisation de véhicules automatisés équipés pour transporter des petits colis, permettant ainsi un tri efficace dès le point d’origine. Les marchandises sont regroupées selon leur destination, puis livrées en ville par des véhicules combinant les chargements de plusieurs clients.

Des études menées en collaboration avec l’Université de Zurich ont démontré que le système Cargo Sous Terrain pourrait réduire jusqu’à 25 % du trafic de marchandises dans la ville de Zurich, illustrant ainsi son potentiel à grande échelle.

Connectivité pour concilier villes et marchandises (source : Gabriele Guidicelli, directeur technique & énergie, Cargo Sous Terrain)

Le financement de Cargo Sous Terrain est assuré exclusivement par des fonds privés, conformément à la loi fédérale sur le transport souterrain des marchandises (LTSM). Actuellement en phase de planification, l’entreprise prévoit ensuite de solliciter en 2024-2025 l’autorisation de construction auprès des autorités fédérales.

Décongestionner et décarboner les transports de passagers sur l’eau

En phase d’expérimentation, MobyFly, une jeune pousse du canton du Valais, conçoit des bateaux à foils rapides pour le marché du fast ferry. Sa mission ? Décongestionner les villes et contribuer à décarboner le transport maritime.

MBFY10 avec foils relevés © MobyFly
MBFY10 avec foils déployés © MobyFly

« L’une des caractéristiques les plus marquantes de ces bateaux hydro-foil est leur logiciel de contrôle de vol, développé à partir de la technologie des drones », souligne Sue Putallaz, co-fondatrice et CEO de la start-up. « Avec une expérience de dix ans, ce logiciel a déjà fait ses preuves sur de nombreux bateaux, y compris dans des compétitions prestigieuses telles que l’America’s Cup. Il garantit une stabilité optimale du bateau, tout en permettant d’atteindre une vitesse optimale pour une efficacité énergétique maximale ».

Propulsés par des moteurs électriques ou à hydrogène à 70 km/h, selon MobyFly ses bateaux sont capables de consommer jusqu’à 95 % moins d’énergie que les ferries au diesel en service aujourd’hui. Bien que la législation actuelle oblige encore la présence d’un conducteur à bord, avec le temps, il sera envisageable de passer en pilotage autonome.

Les lignes de transport couvrant des distances de 0 à 100 kilomètres à travers le monde constituent le marché ciblé par MobyFly. Les bateaux sont conçus pour accueillir entre 12 et 350 passagers, répondant ainsi aux besoins non seulement des voyageurs touristiques, mais aussi des pendulaires (navetteurs) cherchant à se déplacer efficacement d’un point A à un point B.

L’entreprise, qui dispose déjà d’un prototype certifié sur le lac Léman, prévoit de lancer prochainement sa première pré-série.

Soutien politique, partenariats et emplacements stratégiques

Une des belles « success-stories » racontées pendant le voyage est celle de Carvelo, un projet issu de l’Académie de la Mobilité (voir encadré) et développé en collaboration avec l’Office fédéral de l’énergie en 2015. Au fil des années, Carvelo est devenue la plus grande plateforme mondiale de partage de vélos-cargos électriques avec un réseau couvrant plus de 100 villes en Suisse en 2023. Son modèle commercial est rentable, avec un chiffre d’affaires de 1,6 million de francs suisses par an.

Carvelo en chiffres (source : Dr Jorg Beckmann)

Selon Dr. Jörg Beckmann, vice-directeur du Touring Club Suisse et directeur général fondateur de l’Académie de la mobilité, les leçons tirées de Carvelo soulignent l’importance du soutien politique dans la mise à l’échelle de solutions innovantes. En outre, les partenariats avec les entreprises locales et l’emplacement stratégique des stations de vélos-cargos auprès des commerçants ont permis d’étendre la portée et l’utilisation du service.

L’emplacement stratégique des stations de vélos-cargos auprès des commerçants est clé (source : Dr Jorg Beckmann)

Des start-ups innovantes, des acteurs industriels et des gouvernements nationaux unissent leurs forces au sein de l’Académie de la Mobilité, créée en 2008 par le Touring Club Suisse (TCS). Elle œuvre pour un développement structurel durable des mobilités et joue un rôle central dans le conseil politique. Ses efforts de lobbying visent à promouvoir les solutions de mobilité partagée.

Les initiatives pionnières menées par Dr. Jörg Beckmann et son équipe sont par exemple :

– le transport par drone et le e-VTOL avec la création de la Drone & Vertical Mobility Academy, une commande originale de la Fédération Internationale de l’Automobile (FIA) ;

– la mise en œuvre de solutions du quotidien comme Carvelo ;

– des offres de véhicules électriques partagés.

Fairtiq, une billettique intelligente pour les transports publics

Une autre belle réussite suisse est celle de Fairtiq qui propose une application mobile actuellement disponible en Suisse, Allemagne, en Autriche, au Liechtenstein et en France pour les transports publics (train, tram, bus). L’utilisateur n’a qu’à « swiper » pour démarrer son trajet et pour le clôturer à destination. L’application détecte automatiquement le moyen de transport utilisé par le passager puis sélectionne, chaque fin de mois par exemple, la facturation de la meilleure marché pour le passager en fonction des données collectées et des offres disponibles chez les opérateurs de transport.

L’utilisateur de l’appli n’a qu’à « swiper » pour démarrer son trajet et pour le conclure à destination (source : Gian-Mattia Schucan, fondateur et CEO, Fairtiq)

Depuis son lancement en 2016 à Berne, Fairtiq a géré plus de 150 millions de voyages à travers ses systèmes, dont 3 millions rien qu’en France. La très grande simplicité du système pour les passagers fait sa force.

Une appli pour tout le monde ! (source : Gian-Mattia Schucan, Fairtiq)

Les clés du succès de Fairtiq, selon son fondateur et co-CEO Gian-Mattia Schucan, résident dans des solutions innovantes et personnalisées pour répondre aux besoins diversifiés de sa clientèle internationale, un investissement continu dans la R&D et une équipe diversifiée. « Avec des professionnels issus de divers horizons et dotés d’expertises variées, on cultive un environnement collaboratif et stimulant qui favorise l’innovation et la croissance ».

 La partie émergée de l’iceberg

Lors de ce voyage exploratoire, la délégation de Futura-Mobility a découvert une Suisse riche en idées et en initiatives innovantes. Les diverses activités de recherche génèrent un foisonnement d’idées à potentiel industriel. Chercheurs, ingénieurs, sociologues, entrepreneurs… tous sont passionnés et interconnectés par l’écosystème d’innovation soutenu par les pouvoirs publics. Les deux jours de voyage de Futura-Mobility n’ont pu révéler qu’un aperçu de cette richesse. Il reste évidemment beaucoup à explorer dans le pays le plus innovant du monde.