đĄ Autonomy 2019
đĄ Autonomy 2019
Lors de lâĂ©dition 2019 du salon Autonomy, le salon annuel qui a lieu Ă Paris sur la mobilitĂ© urbaine, la prĂ©sence trĂšs forte de services et dâĂ©quipements autour des engins de mobilitĂ© Ă©tait frappante par rapport aux Ă©ditions prĂ©cĂ©dentes. Parmi les nouveautĂ©s, un concept de location de casques pliables, destinĂ© aux utilisateurs de trottinettes Ă©lectriques partagĂ©es ; une station autonome alimentĂ©e par des batteries de trottinettes de seconde vie ; et une roue connectĂ©e pour convertir nâimporte quel vĂ©lo en vĂ©lo Ă©lectrique.
De telles innovations montrent bien que le marchĂ© de la mobilitĂ© dire « douce » est bouillonnant. Mais les apparences peuvent ĂȘtre trompeuses. Les opĂ©rateurs ont beau avoir inondĂ© les villes avec leurs vĂ©los et leurs trottinettes en « free-floating » pour tuer la concurrence, des problĂšmes de vandalisme et de durabilitĂ© du matĂ©riel ont jusqu’Ă prĂ©sent contrecarrĂ© leurs efforts pour faire des bĂ©nĂ©fices.
Quand Ă©conomie rime avec Ă©cologie
Ainsi, la rĂ©duction des frais de fonctionnement devient une prioritĂ© pour les opĂ©rateurs qui cherchent Ă rendre leur activitĂ© rentable. Dans ce contexte, il y a de fortes chances qu’ils prennent plus au sĂ©rieux la recharge des batteries ou l’entretien des vĂ©los et des trottinettes Ă©lectriques.
La start-up française Cyclofix s’intĂ©resse Ă l’entretien depuis plusieurs annĂ©es dĂ©jĂ . FondĂ©e en 2016, elle fournit un service mobile Ă la demande, conçu pour « Îter la contrainte pour lâutilisateur que constituent lâentretien et la rĂ©paration des vĂ©los ». Les clients rĂ©servent un crĂ©neau de rĂ©paration avec un rĂ©parateur, sur le lieu de leur choix, via une application mobile ou un site Internet.
Le fondateur Alexis Zerbib (photo ci-dessus) pense quâune maintenance bien rĂ©alisĂ©e est clĂ© pour une utilisation Ă©largie de ce quâil appelle les « appareils de micro-mobilité » – câest-Ă -dire les vĂ©los partagĂ©s, les vĂ©los, trottinettes et scooters Ă©lectriques â qui occupent lâespace public, que ce soit aujourdâhui ou demain. « Une approche planifiĂ©e de la maintenance permettrait dâallonger leur durĂ©e de vie, tout en en sĂ©curisant lâusage, » a-t-il affirmĂ© Ă Futura-Mobility. « Si une trottinette nâest pas entretenue correctement, sa durĂ©e de vie va ĂȘtre de trois semaines seulement, surtout si elle fait partie dâune flotte partagĂ©e. »
Lâexemple de la ville de Strasbourg est selon lui exemplaire â « la ville fait trĂšs attention Ă la durĂ©e de vie des appareils de micromobilitĂ© et elle est trĂšs efficace en termes de maintenance. »
Et puis il y a Smovengo, le consortium qui exploite le service de vĂ©lo en libre-service Paris VĂ©lib depuis janvier 2018, qui, selon M. Zerbib, « consacre beaucoup de temps et d’Ă©nergie Ă l’entretien des vĂ©los pour allongera la durĂ©e de vie de sa flotte ».
Dans le mĂȘme temps, les Ă©missions de carbone gĂ©nĂ©rĂ©es par les vĂ©hicules circulant dans les villes pour gĂ©rer ces flottes partagĂ©es suscitent des prĂ©occupations croissantes. Il existe Ă©galement une incertitude quant Ă la durĂ©e de vie des appareils eux-mĂȘmes, qui varie en fonction du matĂ©riel et de l’intensitĂ© de l’utilisation. Selon le site d’informations commerciales Quartz, la durĂ©e de vie moyenne d’un scooter Ă©lectronique Bird dans la ville amĂ©ricaine de Louisville est de 28,8 jours seulement ! Cela a-t-il encore un sens sur le plan financier ou climatique ?
Deux facteurs majeurs contribuent Ă l’empreinte Ă©cologique des trottinettes Ă©lectriques. Tout d’abord, moins on conduit (des vĂ©hicules Ă carburant fossile) pour les collecter et les redistribuer, plus l’impact est rĂ©duit. DeuxiĂšmement, lâallongement de la durĂ©e de mise en service des trottinettes Ă©lectriques permet de compenser l’impact de leur fabrication.
Sur ce point, Cyclofix a la conscience tranquille : tous ses rĂ©parateurs se dĂ©placent Ă vĂ©lo (Ă©lectrique ou sans assistance). « Oui, nous sommes cohĂ©rents sur toute la ligne », assure M. Zerbib. « Nous utilisons diffĂ©rents modĂšles comme des vĂ©los cargo pour le transport de petits ateliers mobiles, des vĂ©los conventionnels avec des sacs Ă l’avant et Ă l’arriĂšre, des systĂšmes de remorquage, etc. »
Une autre rĂ©ponse Ă ce problĂšme des Ă©missions induites par lâexploitation est la batterie amovible, un modĂšle de fonctionnement adoptĂ© par TIER Mobility. CrĂ©Ă©e en octobre 2018, cette start-up berlinoise exploite aujourd’hui des trottinettes Ă©lectriques partagĂ©es dans plus de 40 villes de 12 pays diffĂ©rents.

« Lâutilisation de batteries amovibles change rĂ©ellement les rĂšgles du jeu », a dĂ©clarĂ© Alexandre Souter, Directeur GĂ©nĂ©ral de TIER en France Ă Futura-Mobility. « Au lieu de transporter les trottinettes vers un dĂ©pĂŽt pour les recharger, on transporte les batteries vers les trottinettes. »
Depuis le mois de janvier 2020, l’entreprise a commencĂ© Ă introduire ce modĂšle d’exploitation interchangeable sur tous ses marchĂ©s. DorĂ©navant, ses Ă©quipes chargent, entretiennent et effectuent des contrĂŽles de sĂ©curitĂ© sur ses trottinettes Ă©lectriques en utilisant des vĂ©los cargo et des fourgons Ă©lectriques, et non plus des fourgons Ă moteurs thermiques. « Cette mesure permettra de rĂ©duire nos Ă©missions opĂ©rationnelles de 80 % », a dĂ©clarĂ© M. Souter.
- Selon une Ă©tude rĂ©alisĂ©e en 2019 par l’UniversitĂ© d’Ătat de Caroline du Nord, environ 43 % de l’empreinte carbone de la vie dâune trottinette Ă©lectrique provient des opĂ©rations quotidiennes, notamment la collecte et la redistribution.
Autonomie 2019 â quelques annonces clĂ©s
- Uber s’associe Ă Cityscoot pour ajouter les scooters Ă©lectriques (e-scooters) Ă son application pour l’Ile-de-France (Paris et sa rĂ©gion) aux cĂŽtĂ©s des vĂ©los Ă©lectriques et des vĂ©los de course.
- Smart Mobility Lab prĂ©sente son Observatoire de la micro-mobilitĂ©, qui prĂ©voit la vente d’un million de trottinettes Ă©lectriques (e-scooters ?) en 2022, contre 350 000 en 2019 et 232 000 en 2018.
- Silence Urban Ecomobility, une sociĂ©tĂ© espagnole de mobilitĂ© Ă©lectrique, prĂ©sente trois modĂšles d’e-scooters qui seront bientĂŽt commercialisĂ©s en France.
- Fluctuo, une start-up spĂ©cialisĂ©e dans la collecte, le traitement et l’analyse de donnĂ©es, lance City Drive, un outil de âbusiness intelligenceâ pour suivre les services de mobilitĂ© partagĂ©s et leur utilisation dans 24 villes europĂ©ennes.
Parlons MaaS, transport public et environnement

L’un des sujets mis en avant dans le programme de confĂ©rences d’Autonomy 2019 Ă©tait la ‘Mobility as a Service’ (MaaS) : l’intĂ©gration et l’accĂšs Ă diffĂ©rents services de transport sur une seule plateforme numĂ©rique.
Futura-Mobility a profitĂ© de l’occasion pour prendre contact avec Hans Arby, fondateur et PDG de la plate-forme suĂ©doise Ubigo, pionnier dans le domaine de la MaaS. Il a soulignĂ© plusieurs dĂ©fis Ă relever pour mettre en Ćuvre cette nouvelle approche de la mobilitĂ©, tels que les diffĂ©rentes approches de gouvernance de l’open data pour la MaaS en NorvĂšge, en SuĂšde et en Finlande. En outre, du cĂŽtĂ© des consommateurs, il reste encore du chemin Ă parcourir pour les sensibiliser Ă leur empreinte environnementale. « Ce n’est pas gagné », dâaprĂšs M. Arby. « Amener les gens Ă changer leur attitude Ă l’Ă©gard de la mobilitĂ© et leur comportement en matiĂšre de voyage reste un dĂ©fi ».
Se joignant Ă la conversation, Sylvain Haon, directeur de la stratĂ©gie de l’UITP (Association internationale des transports publics) a expliquĂ© les fondements de la campagne ‘One Planet, One Plan’ â un manifeste lancĂ© par l’UITP en septembre 2019 pour que les transports publics restent en tĂȘte de tous les programmes d’action sur le climat. « Nous voulons faire comprendre aux dĂ©cideurs que chaque solution proposĂ©e pour faire face Ă l’urgence climatique passe nĂ©cessairement par l’amĂ©lioration des systĂšmes de transports urbains et locaux ».

One Planet, One Plan est une campagne en quatre Ă©tapes qui encourage d’abord les villes Ă donner la prioritĂ© Ă la marche et au vĂ©lo dans le cadre d’une approche prospective de l’urbanisme. La deuxiĂšme Ă©tape souligne l’importance de renforcer les transports publics en tant qu’Ă©pine dorsale de tous les services de mobilitĂ© urbaine. La troisiĂšme Ă©tape vise Ă mettre en place des incitations financiĂšres et un cadre rĂ©glementaire pour une transition en matiĂšre dâĂ©missions. La quatriĂšme Ă©tape souligne l’importance de garantir l’accĂšs Ă des sources d’Ă©nergie propres afin de rĂ©duire davantage l’empreinte carbone.
Bien qu’il prĂ©conise les transports publics de base, c’est-Ă -dire le train, le mĂ©tro, le bus et le tramway, M. Haon insiste sur la nĂ©cessitĂ© d’un plus large Ă©ventail de services de mobilitĂ© et de connectivitĂ© pour complĂ©ter l’offre. âNous comptons sur l’innovation, sur les plateformes numĂ©riques, pour crĂ©er des liens entre les diffĂ©rentes solutions de transport durable, pour offrir les meilleurs itinĂ©raires aux piĂ©tons, ainsi que diffĂ©rentes solutions de vĂ©lo en libre-service, et pourquoi pas les trottinettes Ă©lectriques, afin d’avoir un transport Ă la demande qui complĂšte l’effet structurant des transports publics de masseâ.
 Douce, active , partagée, motorisée⊠le sens des mots de la mobilité
Dans l’espace urbain actuel en constante Ă©volution, les termes de âmobilitĂ© douceâ et de âmobilitĂ© activeâ se confondent. Se rĂ©fĂšrent-ils Ă la mobilitĂ© non motorisĂ©e, c’est-Ă -dire Ă la mobilitĂ© Ă propulsion humaine ? Dans l’affirmative, cela exclut-il les vĂ©los et les trottinettes Ă©lectriques ? Ou bien se rĂ©fĂšrent-ils plus largement aux alternatives Ă la voiture, en complĂ©ment des transports publics ? Quelle est la place du partage ? Les Ă©missions de carbone doivent-elles ĂȘtre nulles ? Ces termes dĂ©crivent-ils une mobilitĂ© respectueuse des personnes ? Dans ce cas, qu’en est-il des dangers des trottinettes Ă©lectriques sur les trottoirs ?
Pour Alexis Zerbib, la mobilitĂ© douce doit s’intĂ©grer harmonieusement au paysage urbain, ĂȘtre silencieuse et peu ou pas polluante. « Recharger un vĂ©lo Ă©lectrique pesant entre 15 et 20 kg, ou une trottinette Ă©lectrique, nĂ©cessite 50 fois moins d’Ă©nergie qu’un vĂ©hicule avec un moteur Ă combustion qui va peser environ 1,2 tonne et qui sera utilisĂ© pour transporter une seule personne », a-t-il dĂ©clarĂ©. « La taille et le poids de ces appareils correspondent au nombre de personnes qui les utilisent. Ils n’Ă©mettent que peu ou pas de polluants et contribuent Ă apaiser les villes en permettant aux piĂ©tons et aux autres usagers de la route de se dĂ©placer Ă des vitesses acceptables, sans pollution sonore additionnelle ».
M. Haon considĂšre que la mobilitĂ© active, c’est-Ă -dire la marche et le vĂ©lo sans assistance Ă©lectrique, est une nĂ©cessitĂ© pour stimuler la mobilitĂ© globale dans une ville. « Mais nous savons aussi trĂšs bien que cela ne peut pas rĂ©pondre Ă tous les besoins de transport », a-t-il dĂ©clarĂ© Ă Futura-Mobility. « C’est pourquoi l’UITP envisage le systĂšme de transport urbain comme un tout, englobant les transports publics de grande capacitĂ©, la marche et le vĂ©lo, ainsi que les ânouvelles solutions de mobilitĂ©â comme les VTC, les vĂ©los partagĂ©s et les trottinettes [avec ou sans assistance Ă©lectrique] ».
L’une de ces ânouvelles solutions de mobilitĂ©â est lâautopartage en boucle, basĂ© sur des places de stationnement rĂ©servĂ©es oĂč lâutilisateur prend la voiture et doit la rapporter, par opposition Ă lâautopartage en free floating. Pour discuter de ce mode de transport et de sa compatibilitĂ© avec l’Ă©volution des usages de mobilitĂ©, de l’espace urbain et le changement climatique, Futura-Mobility a rencontrĂ© Xavier Corouge (photo ci-dessus), directeur gĂ©nĂ©ral de la Business Unit MobilitĂ© urbaine d’Europcar Mobility Group.
« Dans notre vision de la mobilitĂ© urbaine, l’Ă©pine dorsale doit rester les transports publics Ă grande capacitĂ©, principalement le rail », a-t-il dĂ©clarĂ©. « Cependant, comme le rail ne peut pas rĂ©pondre Ă tous les besoins, nous devons pouvoir associer Ă cette Ă©pine dorsale des solutions adaptĂ©es Ă chaque besoin, comme l’autopartage ».
Interview complÚte de M. Corouge  >>> ON BOARD WITH